- Roger GAILLART (1809-1887) un homme de passion - Géomètre historien républicain
Roger, Jean Gaillart naît, se marie, et meurt à Lévignacq (23 octobre 1809-11 novembre 1887). Il passe son enfance dans une maison du bourg du village, « la maisons de la nourrice » de la famille Boucau. Roger Gaillart est un autodidacte. Après avoir fréquenté les bancs de l’école communale de Lévignacq, il est employé rapidement comme géomètre du cadastre dans des temps où les opérations de cadastrage foisonnent. Il gravit au galop les échelons d’une carrière de géomètre dont il ne pouvait imaginer qu’elle serait d’une longévité rare. En effet, il exerce en qualité d’expert géomètre pendant plus d’un demi-siècle. Dès 1854, il est élu au Comité central des géomètres de France. Profondément marqué par l’idée républicaine, il contribue à faire de Lévignacq un bastion républicain. En 1869, en pleine ère napoléonienne, il est élu conseiller municipal avec le total de voix le plus élevé tout en affichant sans ambiguïté ses sentiments pro-républicains. Son influence sur l’opinion publique locale est alors loin d’être négligeable. A la chute de Napoléon III, il joue un rôle important dans la constitution et l’action des comités républicains dans les Landes. Parallèlement à son activité professionnelle et son engagement politique, Roger Gaillart s’intéresse à l’histoire de sa région, et assume son nouveau statut d’érudit local en publiant plusieurs articles dans la Revue d’Aquitaine. Sa faculté d’observation aiguisée par sa pratique quotidienne de géomètre, sa connaissance approfondie d’un « pays » qu’il parcourt incessamment, son humanisme l’amènent inexorablement s’intéresser au patrimoine et à l’histoire de sa région.
- Georges JOUINE (1885-1955) : de Lévignacq à Houston – Diplomate et industriel
Né à Lévignacq, fils de Jean Jouine, équarrisseur, et de Marie Lataste, il rejoint en 1900 sa demi-sœur mariée au Texas avec un banquier; neveu de la famille chez qui elle avait été employée. Il obtient la nationalité américaine neuf ans plus tard. Il fait ses études à l'Université du Texas. Major de promotion en Génie civil, ingénieur d'Etat, en 1907, il retourne en France pour s'engager dans l'Armée française dès le début de la Grande guerre. Tout le long du conflit, il s'illustre sur plusieurs fronts, en Belgique, à Arras, sur la Somme à Verdun où il est gravement blessé. Il engrange 14 médailles et citations dont la Croix de la Légion d'Honneur avec palme et 3 étoiles d'argent, et la Croix de Guerre. De 1924 à 1941, G. Jouine est nommé agent consulaire à Houston. En parallèle, il fait une brillante carrière dans l'industrie pétrolière. Ainsi de de 1937 à 1955, il est président de la « Gladys City Oil, Gas and manufacturing Company ». Cependant, il n’oublie pas son sud-ouest natal, y revenant régulièrement. Il visite sa famille à Castets, retrouve ses frères à Libourne, rencontre régulièrement le maire Lévignacq, Joseph Castillon, son vieil ami d'enfance. Son attachement à Lévignacq, l’incite en 1956 à faire un don de 400 dollars à la commune (correspondant alors à 140 000 F). La même année, la maladie provoque son hospitalisation, il décède quelques mois plus tard à Houston, le 7 mai 1957.
- Roger LARTIGUE (1889-1984) : un lévignacquois éclectique – Industriel et inventeur
Maire de Lévignacq de 1919 à 1928, il fut un industriel entreprenant et un inventeur productif et de grand talent. Son autre passion fut le sport qu’il exerça jusqu’en 1914, année où gravement blessé et conserva toute sa vie des séquelles de ses blessures. Etudiant en médecine à Bordeaux, il fut champion d’escrime du Sud-Ouest et un des premiers étudiants faisant partie du SBUC. En 1911, il s’adjuge le titre de champion de France amateur de boxe française. Il fut aussi un excellent cavalier, pratiqua le tennis avec talent. Il fut aussi un nageur exceptionnel dont on ne comptait plus les actes de dévouement. Jusque vers la fin des années 1950, il était d’usage de placer les fils d’une installation électrique dans des moulures de bois. Mais dès les années 20, Lartigue construisit à Lévignacq une usine de moulures électriques. Il fit venir la voie ferrée dans l’usine pour expédier ses moulures en particulier à son dépôt de vente directe à Paris. Il inventa une machine pour fabriquer les douves des tonneaux de résine. Ce fut un grand succès pendant 25 ans, en particulier sur le marché espagnol. Il fut l’inventeur de la voiture « Sans ressorts » ainsi nommée pour sa suspension à air comprimé. Pendant l’occupation, Roger Lartigue vivait à Vieux-Boucau. Il y créa une petite affaire avec quatre fours pour faire du charbon de bois qui servait aux gazogènes. Cette affaire fonctionna jusqu’à la Libération. C’était une installation rustique et efficace que M. Lartigue appelait avec humour « Gone with the wind ». Etant fin pêcheur au cordeau, il inventa après la guerre un moulinet à système de dévrillage qui connut jusqu’à la fin de sa vie un bon succès en France et en Afrique occidentale : « Le Robur »
- Charles PRAT (1898-1994) : un homme engagé dans le siècle – Syndicat des résiniers
Des quatre personnages de cette galerie de portraits, Charles Prat est le plus contemporain. Né en 1898, il traverse tout le XXe siècle pour nous quitter aux portes du troisième millénaire, le 27 novembre 1994 à Morcenx. A travers son engagement politique et surtout syndical, moteur de toute sa vie, il participe activement à l’histoire sociale du département des Landes mais aussi nationale, ses fonctions ou ses mandats l’amenant à être confronté aux évènements marquants qui jalonnèrent les années 1920 à 1980. Fils de cultivateurs, Charles Prat, gemmeur, petit propriétaire exploitant, fut combattant durant la Grande guerre, durant laquelle son père fut tué. Il joua un grand rôle dans le syndicalisme agraire landais, fortement ébranlé par l’échec des mouvements de 1919-1920 et dont le renouveau s’amorça après 1926. Il adhéra au syndicat des gemmeurs de Lévignacq le 20 mars 1914 et en devint le président le 10 mai 1924 (il occupait encore cette fonction en 1974). S’il fut élu conseiller municipal en 1929, ce n’est qu’en 1935 qu’il adhéra au Parti socialiste. Aux élections municipales de 1935, il figura en tête d’une liste de type Front populaire qui eut cinq élus sur douze. Après les spectaculaires manifestations des métayers et résiniers à Mont-de-Marsan le 15 mars 1934, il participa à la création de la Fédération des gemmeurs et métayers du Sud-ouest qui naquit de la fusion de la Fédération des gemmeurs du littoral, de l’Union fédérative des gemmeurs et des métayers du Sud-ouest, les Paysans-travailleurs. Cette fédération dont Charles Prat fut le secrétaire général devint rapidement la plus puissante organisation syndicale de la région, la plus représentative de la population, représentant la première activité des Landes. Lorsqu’au mois de janvier 1937, conformément aux décisions du congrès de Saint-Symphorien, elle adhéra à l’Union des syndicats confédérés de l’Adour, elle rassemblait plus de 20 000 « travailleurs de la terre » répartis en 130 syndicats. Charles Prat joua un rôle important dans le déroulement et le dénouement de la grève des gemmeurs du printemps 1937, « une grève intéressant plus de 30 000 gemmeurs sur trois départements ». Les grévistes qui n’avaient pas commencé le piquage, obtinrent le bénéfice des allocations familiales et des assurances sociales. Il fit un voyage en Union soviétique et exprima à son retour des réserves sur le régime. Le Bureau confédéral de la CGT décida le 26 mars 1938 de regrouper les syndicats landais en une Union départementale. Le congrès de Morcenx organisa la nouvelle UD et désigna Charles Prat comme secrétaire général. En juin 1938, il participa à l’accueil de Georges Monnet à Sabres.
Prat avait été mobilisé à la Compagnie des Sapeurs forestier de Mimizan au début de la Seconde Guerre mondiale. Au début de l’Occupation, il sembla se rallier à la politique de Vichy. Prat fut nommé membre du Conseil national de Vichy en 1941. Sous le couvert d’une collaboration de façade, Prat s’évertue à maintenir les gemmeurs sur le massif forestier et contribue au retour de prisonniers de guerre sous le prétexte que leurs compétences de résiniers sont indispensables à l’exploitation du pinhadar. La mémoire collective a conservé le témoignage de prisonniers landais dont le retour dans leurs foyers fut dû à cette filière « gemmeur » alors qu’ils n’avaient jamais touché à un hapchot. A la lIbération, Prat bénéfice d’un soutien considérable, celui de Louis Saillant, responsables de la C.G.T. clandestine pendant la guerre, mais aussi président du C.N.R., le Conseil National de la Résistance. Prat est relevé de son inéligibilité pour avoir participer « à la lutte contre l’ennemi ». Après la guerre, en dépit de la scission syndicale, il demeura secrétaire général de la fédération des gemmeurs et métayers du Sud-Ouest au moins jusqu’en 1953. Ce lien avec la CGT – et ses responsabilités de PDG de l’Union coopérative des résineux, organisme interprofessionnel – l’empêchèrent de militer au Parti socialiste SFIO. Après 1968, il reprit une activité syndicale et était encore secrétaire de son syndicat en 1974. Charles Prat, malgré ses fonctions multiples qui l’accaparaient, aimait à revenir à Lévignacq, village dans lequel il avait conservé sa ferme natale. Le 27 novembre 1994, Charles Prat décède à Morcenx. Son corps est enterré dans le village qui lui est resté toujours si cher : Lévignacq.